Les conditions techniques sont actuellement très favorables aux obligations à haut rendement. Qu’entendons-nous par là ? Eh bien, nous parlons à la fois de l’offre et de la demande.
L’offre obligataire, commençons par là, est en effet très favorable ; cela concerne à la fois la quantité de nouvelles émissions sur le marché et l’offre disponible globalement. Du fait de l’environnement de faible croissance, les entreprises se tiennent à l’écart des grandes opérations de fusions-acquisitions, ce qui entraîne typiquement un pic dans le financement par obligations à haut rendement.
L’offre provenant des émissions n’est pas si élevée que cela mais, dans certains cas, on observe également une offre nette négative puisque certaines obligations sont retirées du marché des titres à haut rendement. Par exemple, la structure du capital obligataire de Wind Tré : 10 milliards d’obligations européennes ont été refinancées sur le marché par l’intermédiaire d’une entité Investment Grade. Il s’agit donc d'une offre nette négative sur le marché.
De toute évidence, lorsque la notation de crédit de certaines de ces entreprises à haut rendement fait l’objet d’un relèvement et bascule dans la catégorie Investment Grade, elle siphonne l’offre du segment du haut rendement.
Maintenant, si l’on se penche sur la demande et les taux négatifs, l’appétit des investisseurs pour le rendement les pousse à rechercher des obligations et des investissements qui offrent des rendements élevés, ce dont a clairement bénéficié le segment du haut rendement.
Selon nous, les taux négatifs sont favorables aux spreads des obligations à haut rendement puisqu’ils incitent les investisseurs à délaisser les actifs peu rémunérateurs au profit des actifs à rendement élevé, et le segment du haut rendement en est un très bon exemple.
L’avantage, c’est que les banques centrales ne se contentent pas d’offrir des taux négatifs, mais qu’elles donnent aussi l’assurance que les taux resteront bas pendant une période prolongée. Ainsi, les investisseurs se sentiront plus en confiance d’atteindre un rendement à long terme, et pas seulement à court terme.
Si nous considérons la faiblesse des rendements relatifs en Europe, ce n’est pas nécessairement toujours le cas, surtout pour les investisseurs en dollars. En effet, lorsqu’un investisseur en dollars achète ces obligations européennes à haut rendement pour les couvrir ensuite en dollars, comme c’est le cas pour nous dans le cadre de notre stratégie Global High Yield, encore une fois, cela lui permet d’obtenir un meilleur rendement. En fin de compte, cela crée donc un rendement plus intéressant pour ces investisseurs en dollars.
Nous continuons d’observer une dispersion entre les différents secteurs du segment du haut rendement, qui n’a peut-être pas tout à fait la même ampleur qu’en 2018 mais qui nous offre néanmoins des opportunités de nous positionner en fonction de nos indices de référence.
Les secteurs des transports et de la santé, par exemple, ont eu tendance à sous-performer les autres secteurs depuis le début de l’année.
Pour ce qui est du secteur des transports, prenons le transport maritime : non seulement nous l’avons récemment sous-pondéré, mais nous le vendons également à découvert. En effet, il est affecté à deux niveaux : à la fois par la baisse de la demande due à un recul de la croissance et par l’entrée en vigueur de la nouvelle réglementation IMO 2020, prévue au début de l’année prochaine et qui obligera l’ensemble des compagnies maritimes à réduire leurs émissions de soufre.
Ce double impact commence réellement à nuire à ce secteur, et même si certaines compagnies disposent d’une marge de manœuvre significative, nous souhaitons vraiment exploiter ce secteur en le sous-pondérant, voire en prenant une position courte.
La dispersion au niveau des émetteurs au sein du segment européen du haut rendement a constitué un véritable thème d’investissement au cours des 18 derniers mois, et une réelle opportunité pour nous, en tant que gérants actifs et grâce à la recherche fondamentale, de nous tenir à l’écart de ces perdants et de surperformer notre indice de référence. Il est intéressant de noter qu’aux États-Unis, ce thème de la dispersion des émetteurs ne s’est réellement révélé qu’il y a deux ou trois mois environ.
Et Seth, l'autre co-gérant de la stratégie Global High Yield, ainsi que les analystes basés à Denver commençaient probablement à se lasser un peu de toutes ces discussions concernant la dispersion sur le marché européen. Mais lorsque nous avons posé la question de savoir quand elle allait s’accélérer aux États-Unis, cela les a vraiment aidés à se préparer à un environnement de dispersion accrue aux États-Unis et leur a permis d’éviter les perdants parmi les nombreux émetteurs américains, lesquels ont ensuite commencé à chuter au cours des deux ou trois derniers mois.
En termes d’allocation régionale dans le cadre de notre stratégie Global High Yield, nous avons eu tendance à surpondérer le risque européen, à adopter un positionnement neutre à l’égard du marché américain, et à sous-pondérer légèrement les marchés émergents. La stratégie a vraiment bénéficié de cette allocation car les marchés émergents ont connu des difficultés, comme cela a été le cas de l’Argentine.
Mais dans l’ensemble, l’Europe a eu tendance à surperformer grâce à la politique accommodante de la BCE, aux taux négatifs et aux achats potentiels des banques centrales qui ont entraîné un resserrement des spreads du segment européen du haut rendement par rapport à ses homologues américains et émergents.
Mais les marchés émergents ont tellement sous-performé que nous envisageons désormais de commencer à renforcer notre exposition à cette région tout en réduisant une partie de notre surpondération du marché européen, puisqu’il a déjà surperformé depuis le début de l’année.
En outre, si nous nous penchons plus spécifiquement sur les catégories de notation, la dispersion au sein du segment européen du haut rendement signifie en fait que les titres européens notés BB, où la dispersion est moindre, évoluent maintenant dans une fourchette très étroite par rapport à leurs homologues américains, en partie parce que la banque centrale incite les investisseurs présents dans la catégorie Investment Grade à se tourner vers ce segment en quête de rendement.
Au contraire, les titres européens notés B fluctuent au sein d’une fourchette plus large que leurs équivalents américains. Ils recèlent donc des opportunités supplémentaires si notre sélection de titres se révèle judicieuse, étant donné que ce pan du marché présente toujours un niveau de dispersion assez élevé.
Les spreads des titres à haut rendement peuvent-ils tester à nouveau leurs niveaux les plus resserrés ? Si l’on considère la période post-crise financière mondiale, les spreads se sont contractés jusqu’à 295 points de base par rapport aux swaps contre 400 points de base actuellement. Il reste donc du chemin à faire pour revenir à ce niveau et, pour ce faire, il faudra probablement que les risques du marché s’atténuent en partie. Des facteurs comme les négociations commerciales entre les États-Unis et la Chine, l’évolution du Brexit et peut-être une issue favorable pour le marché suite aux élections primaires américaines pourraient avoir une incidence.
Si un ou deux d’entre eux jouaient en notre faveur, il y aurait alors de bonnes chances pour que les spreads commencent à se resserrer, avec l’appui des banques centrales et même dans un contexte de faible croissance. Mais même sans cela, le segment du haut rendement demeure relativement intéressant pour les investisseurs, surtout en termes de rendement et de portage ; mais il faudra que les spreads se contractent de façon significative avant d’atteindre leurs niveaux les plus resserrés, ce qui pourrait entraîner une certaine appréciation du capital.
L’espace (crossover) entre les segments Investment Grade et du haut rendement représente une énorme opportunité pour les gérants actifs en termes de titres à haut rendement. Nos analystes couvrant l’ensemble du spectre de notation des titres Investment Grade et à haut rendement sont ainsi dans une position idéale pour tenter d’identifier et d’exploiter ces opportunités.
De toute évidence, les étoiles montantes sont un bon moyen d’y parvenir. Tesco en début d’année et éventuellement une entreprise comme AXA PPP un peu plus tard sont d’excellents exemples d’étoiles montantes capables de contribuer à la performance si nous les sélectionnons correctement.
Il s’agit aussi de savoir exploiter les valorisations des segments BBB et BB, qui sont souvent mal délimitées. En Europe, le rendement de l’indice représentatif du segment BB est actuellement inférieur à 2 %, alors qu’une obligation subordonnée Volkswagen notée BBB offre un rendement supérieur à 3 % et qu’une obligation subordonnée d’Aroundtown (une REIT européenne) sert un rendement supérieur à 4 %.
Ces valorisations fluctuantes offrent donc d’excellentes opportunités d’investir dans des entreprises qui s'améliorent et dont le rendement est supérieur à celui que nous obtiendrions en investissant sur un segment BB plus classique.