Pour les investisseurs particuliers en France

Investir en fonction du contexte actuel et non du scénario idéal de la dernière décennie

Le co-responsable des actions du continent américain George Maris et le gérant de portefeuille Julian McManus expliquent le risque de fonder des décisions d'investissement sur le contexte marqué par les taux bas de la dernière décennie.

George P. Maris, CFA

George P. Maris, CFA

Responsable des actions – Amériques | Gérant de portefeuille


Julian McManus

Julian McManus

Portfolio Manager | Research Analyst


14 févr. 2023
6 minutes de lecture

Principaux points à retenir :​

  • La récente baisse de l'inflation globale a fait naître l'espoir d'un retour rapide à des taux bas et à une inflation de 2 %. Or les changements structurels survenant au sein de l'économie pourraient maintenir ces deux objectifs hors de portée pendant un certain temps encore.
  • Selon nous, les grands indices boursiers tels que l'indice S&P 500® ne reflètent pas correctement cette possibilité, ce qui accroît le risque baissier pour les investisseurs adeptes de la gestion passive.
  • Dans ce contexte, nous pensons qu'il est important pour les investisseurs d'examiner attentivement la valeur des flux de trésorerie disponibles et de ne pas s'attendre à ce que de faibles taux d'intérêt stimulent les performances.

Au cours du premier mois de l'année 2023, les actions se sont comportées comme si le scénario idéal marqué par de l'inflation faible et des taux bas allait faire son retour. Les grands indicateurs de l'inflation se sont inscrits en baisse, en particulier aux États-Unis, et en janvier la Réserve fédérale (Fed) a ralenti le rythme de ses hausses de taux à un niveau d'un quart de point, ce qui a fait naître l'espoir que les mesures de durcissement monétaire pourraient être en train de diminuer.

Mais il n'a pas fallu longtemps pour que la réalité revienne au premier plan. En janvier, les créations d'emplois aux États-Unis ont totalisé un chiffre surprenant de 517 000, soit plus du double des prévisions du consensus, ce qui a permis de ramener le taux de chômage à son niveau le plus bas depuis plus de 50 ans. Entre-temps, bien que l'inflation américaine soit passée d'un point haut de 9,1 % en glissement annuel à la mi-2022 à 6,4 % en janvier,1 l'indice des prix à la consommation reste nettement supérieur à l'objectif de 2 % fixé par la Fed. En outre, la plupart de ce recul de l'inflation peut être attribué à la désinflation de biens tels que le pétrole et les voitures d'occasion, des catégories qui ont enregistré une hausse exceptionnellement rapide de leurs prix à la suite de la pandémie et qui ne pouvaient pas être maintenus indéfiniment.

En d'autres termes, le scénario idéal ne semble pas près de faire son retour. Le Président de la Fed Jerome Powell l'a reconnu lors d'une réunion-débat à Washington en déclarant que le retour à un taux d'inflation de 2 % « prendra probablement beaucoup de temps ». Le processus ne sera pas sans obstacles. Il sera probablement semé d'embûches et nous pensons qu'il faudra maintenir une politique restrictive pendant un certain temps. »

Un parcours difficile vers les 2 %

Certaines secousses pourraient être causées par des changements structurels au sein de l'économie et ces changements pourraient maintenir l'objectif de 2 % hors de portée pendant un certain temps. À titre d'exemple, la démondialisation augmente les coûts de fabrication car les chaînes d'approvisionnement sont détournées des producteurs aux coûts les plus bas. L'écologisation de l'économie mondiale mobilise beaucoup de capitaux et de matières premières et elle est très réglementée, soit deux facteurs inflationnistes. Le vieillissement de la main-d'œuvre pourrait entraîner des pénuries durables de main-d'œuvre et faire grimper les salaires : entre 2015 et 2050, le pourcentage de personnes âgées de plus de 60 ans va presque doubler, passant de 12 % à 22 % dans le monde.2 En outre, l'absence d'investissements productifs au cours de la dernière décennie dans les secteurs de l'exploitation minière et de l'énergie rend les matières premières particulièrement exposées aux chocs d'offre, ce qui contribue à la volatilité des cours.

Plutôt que de prendre en compte ces mutations à long terme, les marchés préfèrent plutôt cristalliser leur attention sur les chiffres sur l'inflation globale. Compte tenu du recul de cette dernière, l'indice S&P 500® est en hausse de 8 % depuis le début de l'année, l'indice Euro STOXX 50 a grimpé de 12 % et l'indice MSCI WorldSM a enregistré une performance légèrement supérieure à 8 %. Les obligations semblent également relativement bien orientées, l'indice Bloomberg U.S. Treasury Total Return ayant progressé de 1,2 %.3 Par ailleurs, les marchés des taux s'attendent à ce que le taux directeur de la Fed atteigne son maximum à la mi-2023 avant de commencer à baisser en septembre. En revanche, lors de la réunion de janvier/février du Federal Open Market Committee de la Fed, M. Powell a souligné qu'il ne serait pas approprié de réduire les taux cette année à moins que l'inflation ne chute fortement dans les mois suivants.

Prendre la route la moins fréquentée

Nous mettons en garde les investisseurs contre le risque de se laisser entraîner par le comportement moutonnier du marché ou de rester ancrés aux conditions économiques antérieures à la pandémie. Les pressions inflationnistes évoquées précédemment et qui se sont manifestées dans le rapport sur l'emploi de janvier pourraient remplacer les politiques monétaires ultra-accommodantes de la décennie passée. En d'autres termes, si les matières premières se raréfient, si les pénuries de main-d'œuvre persistent et si les coûts de fabrication et d'exploitation augmentent en raison de la démondialisation et/ou de la réglementation, la Fed et les autres grandes banques centrales pourraient n'avoir d'autre choix que de maintenir les taux à un niveau plus élevé pendant plus longtemps. Un tel résultat pourrait potentiellement ralentir la croissance et peser sur les bénéfices des entreprises (au moins à court terme) et aura certainement un impact sur les valorisations des actions.

À cet égard, il se peut que certains indices s'emballent actuellement. À la mi-février, l'indice S&P 500 se négociait à un ratio cours/bénéfice (PER) de 18,3 sur la base des estimations prévisionnelles des bénéfices à 12 mois.4 Historiquement, lorsque le rendement du bon du Trésor américain à 10 ans s'est élevé à 4 %, l'indice S&P 500 a affiché un ratio cours/bénéfice d'environ 16 (voir Illustration 1). Avec un rendement du bon du Trésor américain à 10 ans de 3,7 %,5, l'indice S&P ne semble pas bon marché.

Illustration 1 : Relation entre le rendement du bon du Trésor américain et de l'indice S&P 500

Sur le long terme, un rendement de 4 % du bon du Trésor américain s'est généralement accompagné d'un PER de 16 pour l'indice S&P 500.

Source : Bloomberg.Régression basée sur les données trimestrielles du 30 mars 1962 au 30 septembre 2022 des rendements des bons du Trésor américain à 10 ans et des ratios cours/bénéfice sur 12 mois glissants de l'indice S&P 500, qui est fortement corrélé avec les multiples prospectifs.Le ratio cours/bénéfice (PER) est un ratio couramment utilisé pour valoriser les actions d'une société par rapport à d'autres actions ou à un indice de référence.Il est calculé en divisant le cours actuel de l'action par son bénéfice par action.

Les investisseurs peuvent s'en tirer en payant plus cher pour des actions lorsque les taux d'intérêt sont proches de zéro, mais cette stratégie est plus risquée lorsque les rendements sont plus élevés. Dans le contexte actuel, nous sommes donc d'avis que le prix que vous payez pour un actif par rapport à la capacité de l'entreprise émettrice à générer de la trésorerie est essentiel. Or adopter un comportement moutonnier ne procure pas de sécurité actuellement.

Même si les indices n'offrent pas de refuge sûr, les opportunités d'investissement dans des valeurs individuelles sont encore nombreuses. À titre d'exemple, les banques européennes affichent un ratio cours/bénéfice moyen prévisionnel de 7,6 contre une moyenne sur 10 ans de 10,9,6 et bénéficient très fortement de la hausse des rendements. Les entreprises asiatiques liées aux voyages, dont les actions ont subi des pressions durant la politique chinoise « zéro COVID », affichent de faibles valorisations et pourraient bénéficier d'une reprise des voyages maintenant que les confinements sont terminés.

La liste est longue. Or ce qui importe, c'est qu'il s'agit d'une liste méthodique et ancrée dans la réalité du marché actuel, et pas celui de la belle époque récente.

Information importante

La performance d'un indice ne tient pas compte des dépenses liées à la gestion d’un portefeuille car un indice n’est pas géré et il n’est pas possible d'y investir directement.

Les titres étrangers s’accompagnent de risques supplémentaires, dont la fluctuation des devises, l’incertitude politique et économique, une volatilité accrue, une liquidité moindre et des normes différentes en matière de reporting financier et de communication d’informations, autant de facteurs qui sont amplifiés sur les marchés émergents.

Les secteurs financiers peuvent être considérablement affectés par la multiplication des réglementations. Ils sont également exposés à des changements relativement rapides en raison des distinctions de plus en plus floues entre les différents segments de services et peuvent être fortement affectés par la disponibilité et le coût des capitaux, les variations des taux d’intérêt, le taux de défaut des entreprises et des consommateurs et la concurrence des prix.

1 Bureau of Labor Statistics au 14 février 2023.
2 Organisation mondiale de la santé, « Ageing and health », 1er octobre 2022.
3 Bloomberg. Les données de performance des actions et des obligations concernent l'année jusqu'au 13 février 2023.
4 Bloomberg au 14 février 2023.
5 Bons du Trésor américain au 13 février 2023.
6 Le ratio cours/bénéfice prévisionnel est basé sur l'indice STOXX 600 Banks (EUR) et sur des données mensuelles à 10 ans jusqu'au 14 février 2023.L'indice STOXX 600 Banks est un indice pondéré par les capitalisations boursières qui comprend des sociétés européennes actives dans le secteur bancaire.

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